Vers une intendance plus raisonnable des écosystèmes marins

Étude de cas du RNRE par ACORN-NS

Malgré leur importance capitale pour l’économie mondiale, la sécurité alimentaire ainsi que la subsistance et la culture des peuples autochtones, les espèces aquatiques restent nimbées de mystère. On ne sait pas encore tout sur leurs déplacements et leur habitat. Jusqu’à présent, les données sur les mouvements des animaux importants étaient essentiellement de nature régionale, elles ne portaient que sur un petit nombre d’espèces, voire manquaient souvent complètement pour beaucoup d’espèces essentielles au réseau trophique. Pour parvenir à une intendance judicieuse des écosystèmes marins, l’industrie, les décideurs et les groupes culturels ont besoin d’un tableau précis sur la survie, les déplacements et l’habitat de nombreuses espèces, ainsi que sur leur réaction à l’évolution des conditions dans l’océan.


Suivre des espèces partout sur le globe

L’Ocean Tracking Network (OTN) canadien, à l’Université Dalhousie de Halifax, a créé un réseau de surveillance mondial pour suivre avec précision le déplacement local-international des espèces aquatiques dans les cinq océans de la planète. Le réseau rassemble des scientifiques du monde entier dans une étude révolutionnaire sur la vie marine et les conditions océaniques, qui posera les bases scientifiques d’une gestion durable des océans.

L’OTN recourt à la télémétrie électronique pour repérer les animaux aquatiques et relever divers paramètres environnementaux telles l’oxygénation, la température et la salinité de l’eau. Ses amarres, de la taille d’une quille, captent le signal sonar transmis par l’étiquette des animaux marqués qui passent à moins de 800 mètres. Les données de 2 000 amarres de ce genre et celles de près de 30 000 autres, indépendantes mais compatibles, dans toutes les mers du globe, alimentent le réseau et autorisent l’échange international d’informations, pour établir un système de surveillance qui s’étend à la planète entière. Le réseau recourt aussi à deux modèles de véhicule marin autonomes, télécommandés avec liaison satellite, pour récupérer les données des amarres et, parfois, recueillir de l’information en temps quasi réel.

Qu’est-ce que le RNRE?

Le Réseau national de recherche et d’éducation (RNRE) est un regroupement d’infrastructures, d’outils et de personnes d’une importance capitale dont la raison d’être est de rehausser le leadership du Canada dans les domaines de la recherche, de l’enseignement et de l’innovation. Les partenaires du RNRE canadien coopèrent afin de rendre cette infrastructure indispensable encore plus sûre. Un projet pancanadien sans précédent dans l’histoire est en cours pour assurer une surveillance coordonnée des menaces qui pèsent sur le réseau.

Les recherches de l’OTN ont déjà donné lieu à d’importantes découvertes sur les migrations souvent mystérieuses d’animaux marins menacés d’extinction comme la tortue luth, le requin-pèlerin, l’anguille d’Amérique et le thon rouge de l’Atlantique. Elles ont produit des données d’une importance capitale pour la formulation des recommandations sur la protection de ces espèces. Les études de surveillance ont aussi fait ressortir les limites des plans de gestion existants. Les poissons de récif qui portent une étiquette acoustique, par exemple, quittent régulièrement les zones protégées, ce qui les met en danger.

Consultation des données océanographiques

L’OTN recueille, stocke et partage ses jeux massifs de données par le truchement du Réseau national de la recherche et de l’éducation (RNRE) du Canada, composé de CANARIE et de ses douze partenaires provinciaux et territoriaux. Ce réseau regroupe les infrastructures, les outils et le personnel avec lesquels notre pays est devenu une figure de proue dans les milieux de la recherche, de l’éducation et de l’innovation. Les chercheurs de l’OTN, à l’Université Dalhousie, se connectent au RNRE par le truchement d’ACORN-NS (Atlantic Canada Organization of Research Networks – Nova Scotia).

Toutes les données recueillies par l’OTN sont vérifiées et on en contrôle la qualité. Ensuite, elles sont stockées et agrégées à l’Université Dalhousie avant d’être partagées partout au pays et à l’étranger par le biais des réseaux d’ACORN-NS et de CANARIE. Les données océanographiques sont disponibles immédiatement grâce au Système mondial de télécommunication, là où la Marine canadienne s’en sert pour transmettre les bulletins météo aux navires et où Environnement canada l’utilise pour effectuer ses prévisions météorologiques. L’OTN coopère avec le ministère des Pêches et des Océans du Canada (MPO) pour mettre en place le Système intégré d’observation des océans du Canada (SIOOC) qui emmagasinera les données océanographies glanées par l’OTN, le MPO et diverses universités ou ONG.

Un chef de file en coopération mondiale

Les recherches de l’OTN étayent les politiques marines du Canada, les évaluations de l’impact environnemental qui guident le développement durable de l’industrie maritime, l’aménagement de zones marines protégées et les stratégies de gestion des espèces commerciales, menacées ou en danger d’extinction. Puisque les migrations entraînent les espèces aquatiques dans les eaux internationales, il est impératif de partager les données pertinentes avec le reste du monde, et l’OTN a pris les devants dans le milieu scientifique international en orchestrant les recherches au-delà des frontières nationales.

Grâce à ces données majeures, l’OTN prend aussi la tête des efforts déployés dans le monde pour échafauder les stratégies d’adaptation au changement climatique. Les scientifiques de l’OTN ont notamment animé le débat sur les déplacements des animaux à l’ONU, dans le cadre de l’objectif 14 de son plan de développement durable. Cette participation devrait prendre de l’ampleur jusqu’à ce que débute la Décennie des sciences océaniques, en 2020.